Une définition limitée de la valeur
L'élimination des gaspillages se traduit par un recentrement des activités sur ce qui produit de la valeur pour l'organisation. On parle souvent de Valeur Ajoutée. L'interprétation américaine définit cette valeur ajoutée comme étant la transformation apportée au produit/service que le client est prêt à payer.
Avec cette définition, l'organisation se retrouve totalement dépendante des volontés et désirs de ses clients. Cette définition semble donc contradictoire avec le 1er fondement d'une démarche Lean : La vision.
Rappel : Fondement 1 : La vision
Asseoir les décisions sur une philosophie à long terme, même si cela doit se faire au détriment des objectifs financiers à court terme.
Avoir et formaliser une mission philosophique de l'entreprise
Un but commun au-delà du profit
Fondement de tous les autres principes, transcendant la prise de décision immédiate
Cohérent avec l'histoire de l'entreprise et visant à l'amener au niveau supérieur
Générer de la valeur
Au bénéfice du client, de la société et de l'économie
Évaluer les fonctions de l'entreprise par rapport à cet objectif
Être responsable
Ne pas subir un système
Confiance dans ses capacités et celles des autres
Assumer les erreurs comme source de progrès
Renouveler les compétences
L'application de ce premier fondement de la pensée Lean devrait conduire toutes les entreprises qui se prévalent de la mise en œuvre d'une démarche Lean à renouveler la mission philosophique de l'entreprise pour tenir compte des enjeux du XXIème siècles.
On constate en effet que dans ce 1er fondement, la valeur ne se limite pas au bénéfice du client. Elle intègre les besoins de la société et de l'économie. Elle doit donc définie par l'organisation elle même en prenant en compte l'ensemble de ces paramètres.
Toyota a formalisé sa démarche dans les années 60, période à laquelle les ressources étaient encore majoritairement considérées comme illimitées et la notion de plafond environnemental était loin d'être formalisée. On peut imaginer que, en appliquant l'axe "être responsable" à l'axe "Générer de la valeur", on pourait aisément reformuler ce dernier de cette manière :
Générer de la valeur
Au bénéfice du client, de la société et de l'économie dans le respect des limites planétaires
Évaluer les fonctions de l'entreprise par rapport à cet objectif
Remarque :
Par ailleurs, le lien de proportionnalité entre la valeur et l'argent reste à démontrer.
Nous avons pu expérimenter, de manière assez brutale dans le cadre la crise du Covid-19, que la valeur que nous accordons aux choses n'est pas nécessairement liée à l'argent que que nous sommes prêts à payer : nous trouvons plutôt naturel que des biens communs aussi essentiels que les liens sociaux, la santé ou l'éducation puissent être accessibles à tous.
La valeur d'une heure de travail d'un infirmière ou d'un instituteur est-elle réellement inférieure à celle d'un ingénieur aéronautique ?