Traduction opérationnelle des différentes postures managériales

Les tableaux suivants permettent d'illustrer l'impact des postures managériales adoptées au sein d'une organisation. Ils utilisent volontairement deux postures diamétralement opposées et en partant du postulat que l'ensemble de l'organisation a adopté l'une ou l'autre de ces postures.

La posture Management "traditionnel" correspond aux styles 1 (autoritaire) et 2 (paternaliste) de l'échelle de Rensis Likert. La posture Management "Alternatif" correspond au style 4 (participatif) de l'échelle de Rensis Likert et aux postures de l'innovation managériale.

Dans les organisations, dans un service, voire chez un même individu, plusieurs postures managériales cohabitent.

Impact organisationnel

Management « traditionnel »

Management « Alternatif »

Forme d'organisation

En silo

Plate

L'organisation est structurée en services/secteurs ayant chacun leurs enjeux propres et communiquant peu/mal avec les autres.

L'organigramme est très hiérarchique avec une structure pyramidale "top-down"

Le fonctionnement de l'organisation est structuré par des projets composés d'équipes interdisciplinaires sans niveaux hiérarchiques, à la fois autonomes et reliées fonctionnellement entre elles. On parle alors de sociocratie ou d'halocratie.

Cette organisation transversale coexiste parfois avec une structure hiérarchique par service. On parle d'organisation matricielle.

Prise de décisions

Hiérarchique

Collective

Les décisions sont prises par la direction puis descendent en cascade via les différents niveaux hiérarchiques.

Cela a l'avantage de pouvoir prendre rapidement des décisions. Leur mise en application peut parfois s'avérer difficile car elles ne coïncident pas toujours avec la réalité du terrain (mauvaise prise en compte des contraintes, manque d'adhésion ou de compréhension des collaborateurs...).

Les décisions prises à un niveau local servent les intérêts du service/secteur.

La direction partage une vision et des valeurs avec les membres de l'organisation. Tous peuvent être producteurs d'idées. La prise de décision se fait collectivement.

La prise de décision est plus lente et plus chronophage et nécessite une animation et un processus dédié. La mise en application peut quand à elle s'avérer plus fluide la compréhension et l'adhésion en seront renforcés.

Les décisions prises à un niveau local servent les intérêts de l'ensemble de l'organisation.

Interactions avec les organisations tiers

Conflictuelles

Partenariales

Les autres organisations sont considérées comme des ennemis desquels il faut se protéger et se défendre.

Les fournisseurs sont mis en concurrence forte afin de tirer les prix au plus bas. Les clients sont perçus comme une liste d'insatisfactions et de réclamations potentielles ou effectives à gérer au moindre coût. Toute organisation tiers est envisagée comme un potentiel concurrent qui doit être maintenu à distance de notre intelligence de crainte d'en être pillé.

Ces relations se répercutent parfois à l'intérieur de l'organisation (entre sociétés d'un même groupe, entre services d'une même société, entre équipes d'un même service, entre collaborateurs)

Les organisations tiers sont perçues comme des sources d'apprentissage et d'enrichissement du potentiel de l’organisation avec lesquelles il s'agit d'établir une relation de confiance dans une approche gagnant-gagnant dans une logique d'amélioration mutuelle du fonctionnement interne.

Les fournisseurs sont écoutés afin de mieux comprendre leurs contraintes et les accompagner dans leur développement pour être en mesure de mieux répondre aux attentes de l'organisation. Les clients sont intégrés en amont de la conception/réalisation des produits et services afin de mieux satisfaire leurs besoins explicites et implicites.

Impact sur les positionnements individuels des managers et collaborateurs

Management « traditionnel »

Management « Alternatif »

Prise de responsabilité

Carriériste

Au service du collectif

La prise de responsabilités officielles dans l'organisation est souvent réalisée pour servir ses intérêts personnels, pour un temps déterminé permettant d'accéder à un niveau de responsabilité plus élevé.

Les acteurs n'ayant pas de responsabilité officielle ont tendance à se déresponsabiliser dans leur activité quotidienne.

Chaque individu se sent responsable de son périmètre d'action et est conscient des attentes/besoins du collectif vis à vis de ce périmètre. Le niveau de responsabilité hiérarchique n'est plus le principal axe de progression de carrière.

Image du manager

Glorifiante

Authentique

Le manger est très peu ouvert à la critique et attend des retours positifs sur son action de la part de son environnement professionnel.

Il souligne son autorité auprès de ses collaborateurs.

Ses propres limites sont perçues comme des failles au regard du modèle omniscient qu'il est sensé incarner.

Le manager cherche à avoir un retour de la part de ses collaborateurs sur leur perception de son rôle et sa manière de l'exercer de façon à progresser.

Il est lui même authentique et sincère vis à vis d'eux afin de créer un climat de confiance.

Conscient de ses propres limites, il sait faire preuve d'humilité et se nourrir des idées de ses collaborateurs.

Il n'a plus un rôle de chef mais un rôle d'animateur.

Objectifs stratégiques/individuels

Alignement

Obliquité

La vision globale de l'organisation n'est pas toujours identifiée et partagée.

Les objectifs individuels sont alignés sur les objectifs opérationnels du service/secteur et identiques pour une même catégorie de collaborateurs.

Les enjeux de chaque collaborateur sont pris en compte dans la définition de ses objectifs individuels, dans le but de lui permettre de contribuer à la stratégie collective et au enjeux de l'organisation avec un maximum de motivation.

Motivation individuelle

Traditionnelle

Constructive

Elle est basée sur le niveau de rémunération, la perspective de promotion, la peur de perdre son emploi ou d'être "placardisé"

Fondée sur une connaissance des enjeux personnels de chaque individu, de ses talents et de ses appétences, elle consiste à trouver à chacun la place et la forme d'implication les plus motivantes à ses yeux pour servir les intérêts du collectif.

Gestion des tâches

Sous contrôle

En autonomie

La réalisation des tâches, ainsi que la manière de suivre leur avancement, sont normées/standardisées. Peu d'initiatives sont laissées au collaborateurs et ces derniers se placent plutôt dans une logique d'exécution.

Les objectifs sont identifiés et partagés, mais chacun peu s'organiser comme il le souhaite pour les atteindre. Cela laisse une grande place à la prise d'initiatives dans une logique de conception.

Des processus et outils de régulation spécifiques doivent être mis en place pour s'assurer de cohésion de l'ensemble des activités.

Impact sur la communication

Management « traditionnel »

Management « Alternatif »

Flux d'information

Communication descendante

Communication en réseau

La production de l'information est centralisée, accessible en fonction de son niveau hiérarchique et descendante

L'information est produite de manière décentralisée, accessible de manière ouverte quelque que soit la fonction et le niveau hiérarchique et circule librement entre les individus

Outils de communication

Outils fermés

Outils ouverts

Les outils utilisés permettent un restriction des accès et les compétences requises pour les manipulés ne sont pas partagées

Les outils de communications sont accessibles à tous, simples d'utilisation. Le management visuel est favorisé

Impact sur la gestion du risque et de l'aléa

Management « traditionnel »

Management « Alternatif »

Attitude du manager face à l'aléa

Sauveur

Résolution collective

Le manager réagit personnellement à l'aléa de manière à en supprimer ou en atténuer les effets, préservant ainsi l'organisation des conséquences du problème. Le manager identifie le responsable du problème afin d'appliquer les sanctions et/ou d'exiger des garanties pour que le problème ne se reproduise pas dans son périmètre.

L'aléa, le problème, le dysfonctionnement est considéré comme une source d'apprentissage et de progrès individuel et collectif. Le manager anime la résolution du problème avec les différentes parties prenantes en cherchant à le résoudre avec justesse pour éviter qu'il ne survienne à nouveau et selon une approche systémique pour que la solution mise en place soit bénéfique à l'ensemble de l'organisation.

Attitude du manager face au risque

Crainte

Aventure

La manager étant dans une logique de contrôle total, il attend de ses équipes de tendre vers le risque zéro quelque soit la criticité du risque. Beaucoup d'énergie et de moyens sont officiellement consacrés à éviter des aléas même si ces derniers ont un impact mineur ou une probabilité d’occurrence faible.

Il montre de l’enthousiasme à évoluer dans un environnement non familier et invite ses collaborateur à la curiosité et à l’identification des tendances émergentes qui permettront à l'organisation d'évoluer.

Les aléas sont anticipés collectivement et les risques les plus critiques font l'objet d'actions préventives. Conscient qu'il est impossible d'anticiper 100% des aléas, des outils et méthodes sont mis en place pour gagner collectivement en réactivité dans la résolutions des problèmes qui surviendront.

Attitude des collaborateurs face au risque et à l'aléa

Déresponsabilisation et protection individuelle

Signalement et proactivité dans la résolution

Les collaborateurs déploient plus d'énergie à faire en sorte que l'aléa ne soit pas de leur responsabilité plutôt qu'à prévenir ou à résoudre les problèmes lorsqu'ils surviennent. Lorsqu'ils craignent que le problème leur soit imputé, ce dernier est souvent masqué.

Les problèmes sont donc fréquents et leur impact d'autant plus important qu'ils sont détectés tardivement.

La décision de mise en place d'actions préventives étant prise collectivement, l'énergie qui y est consacrée est considérée comme légitime.

Les collaborateurs ne craignant pas d'être sanctionnés et sachant qu'ils ne seront pas seuls face aux problèmes, ils sont plus enclins à les signaler et à travailler à leur résolution.

Les échecs étant valorisés comme une source de progrès, l'organisation devient plus résiliente.

Capacité d'adaptation / Disponibilité au changement

Faible

Forte

La vision de l'avenir est pessimiste car la capacité d'action n'est envisagée qu'à titre individuel.

La prise de décisions émanant de la direction, l'organisation a besoin pour se transformer d'un dirigeant visionnaire.

La communication n'étant que descendante et les acteurs peu impliqués dans la vie de l'organisation, la probabilité d'adhésion reste faible. La transformation ne pourra se faire que sous contrainte.

La vision de l'avenir, supporté par le potentiel du collectif, est optimiste.

L'émergence d'idées étant décentralisée, le nombre de "capteurs" de changement de l’environnement est démultiplié et confère à l'organisation une plus grande agilité.

Les décisions étant prise collectivement, les changements peuvent acquérir une plus grande adhésion.

Impact sur les services supports

Management « traditionnel »

Management « Alternatif »

Rôle des services support/administratifs

Contrôler

Fluidifier

Ils sont garants du fonctionnement global de l'organisation. A ce titre ils édictent les règles et contraintes, sous la forme de procédures, qui doivent être respectées par les fonctions "cœur de métier" et s'assurent de l'application de ces règles.

Avec une approche centralisée, ils sont souvent proches de la direction et exercent un pouvoir important sur l'organisation.

Ils ont un rôle de soutien aux activités "cœur de métier" et mettent à leur disposition un certain nombre de services afin d'alléger leur charge et de favoriser la création de valeur de l'organisation.

Afin d'appréhender au mieux les besoins des métiers, ils adoptent une forme matricielle ou décentralisée pour une plus grande proximité avec les services "cœur de métier".

Gestion des "ressources humaines"

Opportuniste

Sur le potentiel

Les ressources sont utilisées sans ménagement et sans considération de leurs contraintes personnelles. La valorisation des résultats est occasionnelle et aléatoire. le développement des compétences se fait plutôt dans une stratégie de spécialisation dans un souci d'optimisation immédiate.

Les individus sont considérés comme des ressources au service de l'organisation.

Les contraintes personnelles sont prise en compte dans l’organisation du travail (horaires, temps partiel, télétravail...). La valorisation des résultats est organisée, planifiée et globale. Le développement des compétences favorise la diversification des activités selon les appétences de chaque individu (encouragement de la mobilité interne, partages d'expériences formalisés, etc.).

Les individus sont envisagés comme des potentiels auxquels il s'agit d'apporter un cadre de développement adapté.

Gestion des dépenses

Responsabilité centralisée

Responsabilité décentralisée

Les budgets sont affectés par la direction avec une clé de répartition basée sur l'historique et/ou les objectifs stratégiques définis. Chaque dépense doit être justifiée, les dépassements de budget ne sont pas autorisés.

Chaque service cherche à dépenser le maximum ou développe une activité de lobbying auprès de la direction afin d'obtenir le maximum de budget.

Les budgets sont alloués sur la base des besoins émis par les différents services/projets. Des ajustements peuvent être réalisés selon l'avancement des projets et l'évolution des besoins.

Chacun se sent responsable des dépenses collectives et se limite au juste besoin.

Gestion des conflits

Gagner

Éviter

Le conflit est géré par un rapport de force.

Si l'organisation en a les moyens, elle se dote d'un service juridique conséquent afin de s'assurer une victoire en cas de conflit.

L'organisation cherche à éviter/résoudre les conflits dans une logique de médiation.

En cas de conflit, elle cherchera à trouver, avec les parties prenantes impliquées, la solution qui constituera le meilleur compromis.

Impact sur la performance de l'entreprise

Management « traditionnel »

Management « Alternatif »

Création de valeur ajoutée

Faible

Forte

Une grande part de l'énergie de l'organisation est consacrée au contrôle. Les individus, inhibés par la craintes de la sanction, s’autocensurent dans la formulation d'idées. La récurrence des problèmes non traités à un niveau global entrave la production de valeur. La motivation des collaborateur est inégale. Le manque d'autonomie et les difficultés de communication entre entité/acteurs génère de l'incompréhension et des attentes... L'ensemble de ces facteurs engendre une performance intermittente ou faible.

L'essentiel de l'énergie est consacré aux activités "cœur de métier". L'implication individuelle est renforcée par le lien entre la vision stratégique global de l'organisation et les enjeux personnels des collaborateurs. Les compétences sont développées et valorisées... L'ensemble de ces facteur est favorable à la performance de l'organisation.

Avantages des méthodes de management traditionnel

Les méthodes de management traditionnels est plutôt adaptées à des situations stables, le manager étant garant de cette stabilité. L'organisation se place dans une logique de reproduction pérenne de la culture de ses managers.

Le rôle de manager est un rôle de pouvoir vis à vis de ses collaborateur qui est souvent considéré comme l'atteinte d'un certain statu social.

La fait de ne pas avoir à prendre de décisions et de se placer dans une logique d'exécution est une situation considérée comme très confortable pour un certain nombre de collaborateurs. Les équipes peuvent exprimer un mécontentement sur une situation tout en se déchargeant de la responsabilité de proposer des solutions.

C'est le manager qui est sensé, vis à vis de sa propre hiérarchie, assumer l'intégralité des risques liés à ses prises de décision. Dans un mode de management paternaliste, le manager va protéger ses équipes des éventuels insatisfactions de sa hiérarchie. Dans un mode autoritaire, il va répercuter ce mécontentement sur ces équipes par des moyens coercitifs.

Ce mode de management est performant pour des prises de décisions rapides nécessitant des compétences aguerries possédées par le manager et pour une mise en œuvre rapide de ces décisions par des collaborateurs compétents dans leur domaine mais non habilités à remettre en cause ces décisions (exemple type du cadre militaire).

Limites des méthodes de management traditionnel

Dans des contextes de transformation, ce mode de management prive l'organisation de la richesse des idées et des cultures des collaborateurs.

L'évolution culturelle interne à l'organisation peut conduire à des remises en cause de la légitimité du manager.

Si ces méthodes peuvent être considérées comme confortables pour certains, elles sont aussi source de frustration pour d'autres aspirant à contribuer activement à la vie de leur organisation.

Limites des méthodes de management alternatif

Plus impliquantes, elles peuvent être considérées comme une prise de risques de la part de certains collaborateurs.

La prise de décision est plus chronophage.

Pour le manager, le passage d'un rôle de "chef" à un rôle d'animateur peut être vécu comme une perte de statut social et de légitimité professionnelle.

Avantage des méthodes de management alternatif

Exploitation plus forte par l'organisation du potentiel des équipes.

Épanouissement professionnel dans la participation active à la vie de l'organisation.

Capacité de transformation plus forte de l'organisation par une adhésion aux solutions proposées.

Le partage des gains

Les méthodes de management "alternatifs" posent rapidement la question du partage de valeur ajoutée créée. Si elles prônent de manière explicite le bien être au travail, l'écoute, le fait que chacun trouve sa place dans l'organisation, elles ont aussi pour enjeux de rendre l'organisation plus performante. Elles ne sont cependant pas toujours explicites et transparentes sur la manière dont est redistribué le gain généré par cette amélioration de performance.

Certaines organisations laissent ces décisions à la charge du collectif (transparence des salaires, décision des augmentations pour l'ensemble du personnel y compris la direction, rémunération des actionnaires...).

Certaines organisations limitent le périmètre des décisions prises collectivement à un cadre opérationnel et ne l'étendent pas au périmètre stratégique ou politique, ce dernier restant piloté dans une posture paternaliste ou autoritaire. Si les gains de performance sont susceptibles d'avoir des conséquences négatives sur les emplois des individus qui ont contribué activement à ce modèle, le lien de confiance nécessaire à sa mise en œuvre se rompt et cette posture devient contre-productive.